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C’était un “Je t’aime” d’un autre amour.

Hier soir, j’ai fait un rêve !
D’un monde meilleur ?! ça j’en rêve mais celui-là n’est pas la nuit, celui là c’est quand je suis réveillée ! ^^

 

Non, dans mon rêve, il y avait Patrice. Une personne habituée de l’accueil de jour dans lequel j’ai travaillé. Une personne qui m’en a fait baver, qui nous en a fait baver. Mais surtout un homme qui en bave lui-même. Tellement. Qu’il a baissé la garde et qu’il n’a plus envie de se dépatouiller. Alors les jours s’égrainent à coups de 8-6, de 6 du mois et d’accolades avec ses copains de rue. 

Avec Patrice, il y a eu du respect profond et de la violence pure.

Avec Patrice, nous nous sommes pris la tête. Parfois nos deux visages à quelques centimètres l’un de l’autre. J’ai senti son mépris faire le tour de mon être. J’ai senti son mépris faire le tour de l’accueil. J’ai senti sa violence et je lui ai partagé la mienne, tout comme nos postillons quand les mots ne pouvaient plus être que criés … 

Entre nous, il y a eu des vendredis après-midis pourris à coups d’insultes et de gestes durs. Il y a eu des recadrages et des exclusions que nous avons tenus pour remettre un peu les choses dans l’ordre. Il y a eu des dérapages, les siens, les nôtres, les miens …

Avec Patrice, il y a eu aussi des beaux moments, des échanges de regard profonds, du respect et je pourrai même dire une amitié sincère… Une fois même, je me souviens… Il a glissé une cigarette dans ma poche après m’avoir vu (tenter de) gérer une situation de violence avec un autre gars. J’ai trouvé la cigarette plus tard. Je savais que c’était lui. Quand je l’ai revu, je l’ai remercié pour l’apaisement que j’avais retrouvé en fumant sa clope. Il n’a rien dit. Il a souri. Maintenant, c’est clair. Avec Patrice, il y a eu du respect profond et de la violence pure. 

C’était un “Je t’aime” d’un autre amour.

Durant la nuit dernière, dans mon rêve, nous étions ensemble, nous marchions. Il était bien. J’étais bien. Nous nous sommes dits “Au revoir” car nos chemins se séparaient et il m’a serré dans ses bras et il m’a dit “Je t’aime” à l’oreille.

Non, ce n’était pas un “Je t’aime” de l’amour amoureux. C’était un “Je t’aime” d’un autre amour. Celui qui est fraternel. De l’amour d’amitié d’une personne à une autre. Celui qui dit le respect, la joie qu’on a à se connaître, les épreuves et le chemin qu’on a traversé ensemble. Celui qui dit qu’on se souviendra, que nos coeurs sont marqués par nos rencontres mutuelles. Celui qui demande et qui dit pardon. Celui qui dit qu’il n’y aura peut être pas de demain, mais qu’il y a eu un hier que l’on garde à une place particulière mais dont on se souvient que rarement.  C’était un « Je t’aime » plein d’affection, de tendresse et d’amitié, celui qu’on n’a pas le droit de se dire dans la vie réelle, dans un accueil de jour, ou qu’on ne veut pas dire dans le social, le bénévolat ou ailleurs. 

Alors, j’ai serré son corps amaigri, au point que je sentais presque l’étreinte dans mon rêve, et je lui ai dit “Moi aussi, Patrice”. Nous nous sommes regardés dans ses grands yeux bleus rieurs. Nous avons souri et nous nous sommes quittés.

 

 

Photo de Marco Bianchetti on Unsplash

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